Mois de l'égalité : Carmen Mihaela Ené
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Intégration express en blouse blanche
La Révolution et la fin du régime du dictateur, Nicolae Ceausescu avaient fait souffler un vent d’espoir et de liberté en Roumanie en 1989. Carmen Mihaela Ené avait 26 ans et imaginait des jours meilleurs. Mais c’est finalement en France, à Carcassonne, que cette anesthésiste du centre hospitalier a trouvé le bonheur d’exercer son métier en toute liberté et reçu un accueil chaleureux sans discrimination.
Son accent joliment chantant, venu du pays des Carpates, de la Mer Noire et du Danube, laisse à intervalle régulier échapper une petite note ensoleillée du Sud, témoin vocal de son adaptation. "Je parle Carcassonnaise" s’amuse-t-elle à dire. Carmen Mihaeala Ené nous accueille dans son bureau de consultations du centre hospitalier de Carcassonne avec le sourire des gens bien dans leur tête.
Depuis 2009, cette Roumaine, âgée aujourd’hui de 61 ans, exerce son métier en toute liberté. Membre active de la Confrérie Universelle du Cassoulet, grande défenseuse de ce plat traditionnel, cher à Prosper-Montagné, elle se souvient de son intégration express : "Au bout de deux semaines, j’avais l’impression de travailler ici depuis toujours." Comme beaucoup de ses compatriotes, Carmen avait appris le français à l’école et les bases latines de sa langue natale ont facilité la compréhension.
Victime de harcèlement
Son choix de tout quitter en embarquant alors sa fille de 6 ans et son chien, Carmen l’avait mûrement réfléchi.
J’ai travaillé dans le plus grand hôpital public de Bucarest. A la Révolution, j’espérais que le pays allait changer. Mais j’ai pu voir que cela ne fonctionnait pas. En 2007, je suis passée dans le privé, mais cela n’a rien changé. La corruption était très élevée, l’école ne fonctionnait pas !
Carmen Mihaela Ené
Fille adorée de son père, chef de chantier, qui mènera entre autre d’imposants travaux sur les routes de l’atlas marocain, Carmen se souvient avoir très tôt voulu travailler dans le médical. La nostalgie revient à petit pas à l’heure de se remémorer ces doux moments à soigner chiens et chats vagabonds et de son premier argent de poche gagné en vendant des légumes, sur le marché, avec sa grand-mère. "Avec cet argent, je me suis acheté un atlas d’anatomie ! J’ai toujours voulu aider et soigner les gens."
Mais le chemin pour accéder à son rêve est semé d’embûches. Le regard de Carmen se voile de tristesse à l’évocation de ce professeur de la faculté qui utilise alors son pouvoir pour harceler ses étudiantes.
Je devais passer un examen de rattrapage en deuxième année pour être admise l’année suivante comme onze autres filles. Il m’a harcelé au téléphone. J’ai dû faire appel à des appuis de ma famille pour passer normalement mon examen.
Carmen Mihaela Ené
Je suis heureuse de vivre dans un pays où je peux exercer mon métier en toute liberté
Plus tard, alors que Carmen envisage de devenir chirurgienne viscérale, elle est choquée par la remarque du chirurgien responsable de son stage. "Il m’a dit, tout se passe bien car tu es stagiaire, mais si tu reviens un jour en tant que spécialiste, tu risques d’avoir un accueil différent. Nous sommes un peu misogyne !"
Des années plus tard, elle décide de répondre à un mail de chasseurs de tête. Plusieurs rendez-vous sont programmés dans des hôpitaux français. Le premier à Carcassonne sera le bon. "L’ambiance m’a tout de suite plu." Ici, Carmen n’a pas ressenti de discrimination liée au genre ou à sa nationalité.
Je sais que parfois des personnes âgées ont pu s’étonner de voir que la chirurgienne est une femme, mais moi je n’ai pas vécu cela.
Carmen Mihaela Ené
Dans sa vie personnelle comme professionnelle, Carmen s’est rapidement intégrée et a apprécié l’accueil des Audois. "Je suis heureuse de vivre dans un pays où je peux exercer mon métier en toute liberté."
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